23 janvier 2015

Pourquoi et comment faut-il faire les trucs durs ?

Quand j'étais en classe prépa, dans les interros de maths il y avait deux sortes de questions : les questions faciles, disséminées ça et là et en général repérables aisément, et les questions difficiles. Deux stratégies étaient courantes à l'époque : se précipiter vers les questions faciles et toutes les faire, et ensuite seulement aller voir les questions dures (souvent trop dures) ou bien faire les questions dans l'ordre et suer longuement sur les questions difficiles (en oubliant du coup de voir qu'un peu plus loin il y avait des questions faciles). Evidemment, les questions faciles ça rapporte 0.5 points, les questions dures ça rapporte 2 points. Comme j'ai toujours été un peu psychorigide j'avais du mal à sauter des questions donc j'avais tendance à prendre la deuxième stratégie, dans l'ordre et sans contourner les trucs durs. Et ben du coup ça a plutôt pas trop mal marché, j'ai beaucoup plus progressé en n'ayant pas peur des questions dures, et j'ai gagné plus de points finalement, même en ratant les trucs faciles plus loin.
Bon évidemment c'est naïf et simpliste comme exemple, mais c'est là que j'ai commencé à comprendre la valeur du courage et l'idée de ne pas avoir peur de souffrir un peu pour la bonne cause. Bon j'ai aussi appris ça en lisant Harry Potter ("faire le choix entre ce qui est facile et ce qui est juste", dixit Albus Dumbledore)...
Et en sport c'est la même chose. Quand je fais mes pompes à la maison j'ai mal, c'est dur, alors je pourrais être tentée de gruger, de descendre moins bas, de tenir moins longtemps, d'en faire moins, mais quel intérêt ? Je fais ça pour moi, ça fait du bien au final, et c'est pas dramatique d'en baver un peu ("c'est tout dans la tête", comme dit mon prof de karaté pendant la minute de gainage).

C'est quoi les trucs durs ?


Commençons par essayer de définir / cerner un peu le concept, flou je vous l'accorde, de "truc dur". Pour moi c'est une tâche (ou un effort, un moment) qui est difficile bien sûr, mais qui apporte des bénéfices à court, moyen ou long terme. Ici pas question de faire un truc dur juste pour souffrir s'il n'y a pas de bénéfice derrière (à moins que la résistance à la souffrance soit l'objectif, auquel cas il y a bien un bénéfice avéré).

Voici quelques exemples de trucs durs, mais on peut en trouver bien d'autres :

  • une séance de sport intense : ça fait mal mais au final on a la patate et une meilleure forme / santé.
  • une discussion difficile (avec un ami, un membre de la famille, un collègue) : là aussi c'est souvent un moment difficile à passer (en tout cas le démarrage où il faut beaucoup de courage pour initier la discussion), mais en général les bénéfices sont gigantesques, les problèmes sont résolus ou au moins évoqués clairement, la confiance y gagne et la relation aussi.
  • prendre une nouvelle habitude : ici aussi la difficulté est immédiate, c'est hyper dur de ne pas s'essouffler sur une habitude au bout de quelques jours/semaines (plus de détails ici), et les bénéfices sont évidents aussi en général.
  • un gros truc de boulot, pénible mais aux retombées majeures (suivre une formation sur un sujet difficile, écrire un livre, etc.).
  • des travaux dans la maison : difficiles techniquement et physiquement parfois, mais on y gagne de l'expertise, des sous et une bonne forme.
  • dépenser moins : pas facile de se retenir, mais le résultat est immédiat.
  • aller au boulot à vélo par tout temps : la pluie ça mouille, le gel c'est froid, mais quand j'arrive au bureau j'ai un grand sourire, les joues roses et je me sens bien.


Mais c'est quoi l'intérêt au fait ?


Effectivement la question est légitime, pourquoi ne pas rester dans sa zone de confort, qui est par définition confortable ? Pour moi il y a plusieurs raisons.

D'abord, je trouve que la facilité n'apporte pas grand chose, c'est facile justement. Si on est resté dans sa zone de confort toute la journée, à la fin on ne se sent pas forcément super. Si de plus on a fait des efforts (en refusant des trucs durs, en contournant les difficultés) pour rester dans sa zone de confort, on n'aura gagné au final peu de chose à part une mauvaise estime de soi. Affronter une difficulté c'est tout le contraire. Bien sûr ce n'est jamais facile, mais on a au moins la fierté de pouvoir se dire qu'on a essayé et qu'on n'a pas fuit. Pour moi faire un truc dur c'est toujours le double effet kiss-cool : d'abord on bénéficie des conséquences du truc en question (avec les pompes je suis plus forte) et en plus on est fier de l'avoir fait.

Ensuite, il y a aussi l'effet boule de neige, comme pour les habitudes : d'avoir réussi un truc dur renforce l'estime de soi et le courage pour affronter les suivants. C'est bien plus facile de faire un truc dur quand on en a déjà fait d'autres avant, on se dit assez facilement "bon, ok, c'est dur, mais je peux le faire, je saurai le faire". L'effet boule de neige fait qu'avec chaque nouveau truc dur effectué, on repousse la limite de sa zone de confort, on est confortable dans bien plus de situations. Ce qui était dur dans le passé devient facile maintenant, et petit à petit on devient quelqu'un de meilleur.

Comment on fait les trucs durs ?


Le problème avec les trucs durs c'est que par définition c'est dur de les faire, ça fait peur, et la stratégie d'évitement semble toujours plus attractive sur le moment. Alors comment on fait vraiment pour s'y mettre ? Il n'y a évidemment pas de recette miracle, il faut être courageux et s'y mettre.

Par contre la bonne nouvelle, c'est que ça se travaille et qu'on peut progresser là-dessus jour après jour. Je vous donne ci-dessous une petite liste de ce qui marche pour moi.

  • On commence par identifier les trucs durs. Le plus simple est de lister les choses qui apportent le plus de bénéfices, ou bien de lister les problèmes qui causent le plus d'ennuis.
  • On admet, en pleine conscience, que c'est un truc dur, qu'il va falloir du courage pour le faire, et on fait le choix consciemment de ne pas choisir l'évitement mais au contraire de l'affronter.
  • Dans le même genre d'idées, on est attentif aux signaux d'évitements qui surgissent dans notre esprit ("je suis fatiguée ce soir je ne veux pas sortir courir", "pas envie d'amorcer cette discussion maintenant je ferai ça demain" etc.), on les observe avec bienveillance, c'est notre esprit qui essaie de se défiler, et c'est signe qu'on est face à un truc dur et qu'il ne faut surtout pas céder.
  • Il suffit parfois, comme disait Benjamin Mee dans le film "We bought a zoo" (nouveau départ) de "vingt secondes de courage insensé, littéralement 20 secondes d'embarrassante bravoure" pour arriver à faire un truc dur, car c'est souvent le premier pas qui compte : amorcer la discussion, se mettre en tenue de sport, ...
  • Moi ça me fait du bien parfois de ne pas trop réfléchir et de m'y mettre tout de suite, ça me permet d'oublier que j'ai peur d'avoir mal ou que ce soit dur. C'est un peu lié à l'idée des 20 secondes : il faut se lancer, tout de suite. Tout de suite maintenant par exemple, vous éteignez votre écran et vous faites votre truc dur numéro 1.
  • On aménage son temps et son espace pour faciliter les choses. Par besoin d'en rajouter dans la difficulté, donc on éclaircit tout ce qui peut l'être, on se donne de l'air, de l'espace, du temps, et on y va. Moi par exemple je planifie à l'avance mes séances de sport, je les bloque dans mon emploi du temps en fonction des contraintes du moment. Comme ça pas besoin de réfléchir ou de remettre le sport à plus tard, quand c'est noté j'y vais et c'est tout. Et si je n'ai pas envie j'y vais quand même, et je fais une séance plus cool.
  • On se félicite de toute étape effectuée dans la bonne direction, même si ce n'est pas parfait, d'avoir commencé ou d'avoir fait un petit bout c'est déjà pas mal et ça amorce l'effort.
  • On essaie de susciter et d'utiliser l'effet "challenge" : plutôt que de voir en face de soi une difficulté insurmontable, il est bien plus motivant de la voir comme un défi à relever. Parfois ce simple changement de point de vue suffit à débloquer le courage et l'énergie pour s'y mettre. En gros on transforme "je vais aller courir sous la pluie et je vais avoir froid ça va être pénible" en "mon corps et moi on va se rendre plus fort en affrontant cette grosse pluie et on va être bien plus forts et super contents quand on aura fini".
  • Pour les difficultés trop grosses pour une seule personne, on n'hésite pas à aller chercher de l'aide ailleurs (en fonction du problème : amis, psychothérapeutes, artisans, médecins, famille, professionnels, etc.). Parfois le simple fait de n'être plus tout seul permet aussi de démultiplier son propre courage et finalement de s'en sortir.


Par où commencer ?


Evidemment, on pourrait tous faire une très grosse liste de trucs difficiles à faire qui changeraient notre existence pour le meilleur. Evidemment, c'est comme pour tout, on commence doucement, et une chose à la fois. Je suis justement en train de lire un livre intéressant sur les objectifs et l'expérience montre qu'au delà d'un certain nombre de trucs à faire (4 ou plus) on ne fait plus rien car l'énergie disponible pour les grosses choses n'est pas infinie, elle se divise entre nos différents objectifs. Donc choisissez un, ou deux (éventuellement trois) trucs durs, quelque chose qui aura un gros impact sur votre vie si vous y arrivez, et faites-le ! Tout de suite, ou ce soir, ou dès demain, mettez en place une habitude, armez-vous de courage, lancez-vous, et observez les changements pour le meilleur !


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